La Magie de Remercier
Par Rosa Coll
Il existe un ordre dans l’univers, c’est indiscutable. Il existe un ordre dans le visible, qu’on y accède simplement grâce à nos yeux, ou bien grâce à une extension de nos yeux tournée vers l’immensité : le télescope, ou vers l’infiniment petit : le microscope. Pourquoi devrions-nous supposer que cet ordre se limite seulement au visible et qu’il ne s’étend pas au-delà, dans l’invisible ? Pourquoi devrait-il y avoir cette fracture ou cette coupure ? Bien évidemment, tout cela relève de notre façon de considérer “ l’invisible ”, qui ne prend pas ici un sens ésotérique mais qui se rapporte plutôt à la zone des sentiments — des sentiments qui sont, pour la plupart, eux, aussi invisibles. Pourrait-il aussi y avoir un ordre cosmique au sein de cette zone des sentiments ?
Comment un ordre pourrait-il exister au sein de quelque chose qui peut s’enflammer à tout moment, où les cendres paraissent n’être jamais éteintes, où les raisonnements suivent une logique étrangère à la « raison » ? Pourtant, dès que l’on prête ne serait-ce qu’un petit peu d’attention à ce qui se passe autour de nous, l’intuition, la sensation semble confirmer qu’il existe bien un ordre de cette sorte, un certain équilibre au sein même de la région particulièrement changeante et déséquilibrée de nos sentiments.
Le sentiment de gratitude pourrait se révéler être un exemple flagrant et caractéristique de cet ordre. En effet, notre capacité à éprouver de la gratitude est grande, et cela, indépendamment des blessures ontologiques dont nous avons pu souffrir, indépendamment des dommages dont la majorité d’entre-nous a été l’objet durant la petite enfance — et que le nagual Carlos Castaneda évoque lorsqu’il parle de nos ailes coupées qui nous empêchent de voler, voler au sens métaphorique aussi bien qu’au sens littéral du terme.
Être capable d’éprouver cette gratitude malgré ces blessures que nous avons en nous, être capable de sentir cette chaleur, cette tendresse intérieure, dirigée vers personne en particulier et en même temps dirigée vers chacun et vers chaque chose, cela est une chose abstraite et, pourtant, tendue vers les feuilles vertes qui brillent au soleil, vers le ciel bleu intense, vers la fraîcheur de l’air, la clarté du jour, l’arôme et l’humidité montant de la terre après une forte pluie, vers le silence, l’harmonie, la mémoire.
Et puis, de manière inattendue quelqu’un apparaît, quelqu’un avec un visage, un nom et un prénom, mais il n’est pas le seul, il y en a d’autres, ils apparaissent les uns après les autres — hommes et femmes —, chacun d’entre eux méritant ma gratitude pour m’avoir donner le meilleur d’eux- mêmes.
Soudain, je suis emportée par une vague de gratitude. Peu importe ce qu’ils sont, ces individus sont tous également présents, là, juste devant moi. La gratitude fait partie de l’ordre cosmique. Il est possible que rien ne dérange plus l’ordre cosmique que le manque de gratitude. Merci et S’il-te- plaît : ces deux simples mots régleraient-ils l’univers entier ? Quelle signification de tels mots pourrait-elle avoir en regard de l’immensité de l’univers ? Et pourtant, pourquoi lorsqu’ils font défaut tout apparaît-il déformé ? Les personnes qui ne les expriment pas s’affaissent, se détériorent et s’estompent. Ils tombent de précipices en précipices, décrivant une spirale qui les plonge jusqu’au fond de l’abîme, si jamais ils l’atteignent.
Le nagual Carlos Castaneda est entré en relation avec une grande variété de personnes. Certains d’entre eux furent des sommets d’impolitesse dans leurs manières d’être. « Eh, qu’importent les manières. Est-ce que les manières ne sont pas juste une autre expression de l’ordre social ? » Oui et non, comme tout. Certaines de ces personnes qui approchèrent le nagual Carlos Castaneda furent réellement grossières. Ils pouvaient éventuellement être raffinés à plusieurs égards, voire élégants, mai s’ils criaient pour être servis et pour ordonner, ignorant totalement les mots S’il-vous- plaît et Merci. Si l’on venait à rencontrer une de ces personnes qui étaient entrées en contact avec le nagual — même peu de temps après — on ne la reconnaissait pas.
Elle avait une allure semblable, mais il fallait la regarder à deux fois avant de l’appeler par son nom. Ses manières avaient changées de telle sorte qu’elle avait les mots Merci et S’il vous plaît constamment à la bouche : elle s’était rendu compte qu’il y a toujours une chose pour laquelle on peut se sentir reconnaissant, comme chacune des petites ou des grandes faveurs, ou les nombreux services que l’on nous rend durant la journée, que nous ayons payé pour cela, et plus encore si nous n’avons pas payé.
Cela représente un paradoxe intéressant, compte tenu du fait que les sorciers nous enseignent en même temps de ne pas dire Pardon sans cesse. Pardon semble rait également faire partie de ces mots en relation directe avec le genre d’ordre cosmique dont nous avons parlé précédemment. Beaucoup d’entre nous — particulièrement si nous sommes des femmes — ont été élevés selon un modèle de soumission, qui a fait de nous des personnes enclines à dire Pardon, même si l’on nous marche sur les pieds. Florinda disait : « ¡Pendeja ! Excuse-toi lorsqu’il y a vraiment quelque chose pour laquelle tu dois t’excuser, mais ne soit pas un Babosa. » C’est ainsi que les personnes qui purent approcher la sphère des sorciers furent façonnées, voire ciselées. Aussi insignifiant que cela puisse paraître, le mot Merci régit tout.
La modestie pénètre ceux qui l’expriment, accueillant avec gratitude ce qu’ils reçoivent, des choses sur lesquelles nous n’avons aucun « droit » intrinsèque, puisque rien ne nous est dû. Le contraire est plus souvent vrai : nous croyons que tout nous est dû. Cela s’impose si naturellement que nous ne le réalisons même pas. Ceci appartient à l’état d’esprit du « créancier », auquel nous sommes tellement habitués. Nous recevons et recevons encore sans prendre conscience du fait que nous recevons, ou de ce que nous recevons.
Le flux est néanmoins constant : des senteurs de la terre à l’aube au pépiement des oiseaux au moment du coucher du soleil, en passant par le délicieux déjeuner que nous avons dégusté en excellente compagnie, aussi bien que les querelles, les maux de tête et la colère. Ils représentent tous la vie et la vie est la grâce initiale, la condition naturelle à tous les autres présents. Être capable de remercier est une forme de pouvoir, ne pas être capable de remercier est un manque de pouvoir. Ce manque de pouvoir nous entraîne en spirale vers la ruine.
C’est la « chute » à laquelle les philosophies et les religions font référence, la fameuse chute de la Chrétienté. La chute dont parle Heidegger, appartiendrait-elle au monde dans lequel la gratitude fait défaut ? La Bible fait référence à la fierté et à la vanité qui emplirent le coeur de l’homme lorsqu’il découvrit que des briques pouvaient être fabriquées en faisant cuire de l’argile, et qu’avec ces briques, il était en mesure de construire tout ce qu’il désirait . Il en vint à construire une tour si haute qu’elle pouvait « toucher les cieux ». Don Juan expliqua à Carlos Castaneda que les grandes cathédrales occidentales n’étaient rien d’autre que la preuve de l’égocentrisme de l’espèce humaine.
Nous pouvons nous demander ce qu’il faut en conclure quant aux gratte-ciels. L’ancien testament complète cette narration en décrivant la manière dont Jéhovah —Di eu— fut irrité par l’attitude de l’homme, si bien que lorsque la tour atteignit une certaine hauteur, Dieu créa la confusion parmi les « langues » des hommes — leurs langages — de telle manière qu’ils devinrent incapables de communiquer entre eux, ce qui empêcha toute progression dans la construction de l’édifice.
La fierté de l’homme avait grandi aussi haut que la tour qu’il avait édifiée: l’homme avait cru qu’il avait été celui qui avait construit cela, qu’il en avait été l’unique auteur. Je sais que cela peut sembler une idée assez bizarre, mais la puissance des Etats- Unis ne serait-elle pas sans relation avec l’institutionnalisation de l’acte de remercier qui existe sous la forme du jour de célébration du Thanksgiving ? Y a-t-il d’autres pays dans le monde qui célèbre l’acte de remercier ? Même si aujourd’hui, la célébration du Thanksgiving n’est devenue qu’un simple événement où l’on ne fait presque rien de plus que de se rassembler en famille pour déguster une pintade. On nous apprend qu’avec la répétition, toute l’authenticité originelle se transforme en coquille vide : la répétition appauvrie la signification.
Si nous pouvions seulement retrouver cet élan originel : la chaleur, la tendresse, la joie et la gratitude qui avait dû emplir le coeur de ces premiers colons qui s’installèrent sur ces terres d’Amérique du Nord. La sorcellerie montre le lien essentiel qui existe entre la gratitude — plus précisément entre le manque de gratitude, et la chute. Nous trébuchons, puis nous tombons, et nous tombons sans fin.
Le nagual Carlos Castaneda disait régulièrement à propos des gens autour de lui : « Ils ont chuté. Untel et untel ont chuté. Machin-truc a chuté. » Des chutes abyssales se sont produites par manque de gratitude. Tomber c’est perdre du pouvoir. Quiconque est au sol ne peut pas faire grande chose, jusqu’à ce qu’il s’efforce de se remettre sur pied, par lui-même ou grâce à une assistance extérieure. La chute de l’homme à laquelle il est fait référence dans toutes les religions et les philosophies constitue le moment où l’homme perd son pouvoir. Le manque de gratitude ne provoque pas seulement la perte du pouvoir, mais est intrinsèquement un manque de pouvoir. Remercier exprime le pouvoir de ressentir de la gratitude.
Rosa Coll est écrivain et philosophe. Ses ouvrages traitent principalement des rapprochements entre les courants philosophiques et la pensée des chamans de l’ancien Mexique. Elle a également donné des conférences durant des séminaires de Tenségrité
Par Rosa Coll
Il existe un ordre dans l’univers, c’est indiscutable. Il existe un ordre dans le visible, qu’on y accède simplement grâce à nos yeux, ou bien grâce à une extension de nos yeux tournée vers l’immensité : le télescope, ou vers l’infiniment petit : le microscope. Pourquoi devrions-nous supposer que cet ordre se limite seulement au visible et qu’il ne s’étend pas au-delà, dans l’invisible ? Pourquoi devrait-il y avoir cette fracture ou cette coupure ? Bien évidemment, tout cela relève de notre façon de considérer “ l’invisible ”, qui ne prend pas ici un sens ésotérique mais qui se rapporte plutôt à la zone des sentiments — des sentiments qui sont, pour la plupart, eux, aussi invisibles. Pourrait-il aussi y avoir un ordre cosmique au sein de cette zone des sentiments ?
Comment un ordre pourrait-il exister au sein de quelque chose qui peut s’enflammer à tout moment, où les cendres paraissent n’être jamais éteintes, où les raisonnements suivent une logique étrangère à la « raison » ? Pourtant, dès que l’on prête ne serait-ce qu’un petit peu d’attention à ce qui se passe autour de nous, l’intuition, la sensation semble confirmer qu’il existe bien un ordre de cette sorte, un certain équilibre au sein même de la région particulièrement changeante et déséquilibrée de nos sentiments.
Le sentiment de gratitude pourrait se révéler être un exemple flagrant et caractéristique de cet ordre. En effet, notre capacité à éprouver de la gratitude est grande, et cela, indépendamment des blessures ontologiques dont nous avons pu souffrir, indépendamment des dommages dont la majorité d’entre-nous a été l’objet durant la petite enfance — et que le nagual Carlos Castaneda évoque lorsqu’il parle de nos ailes coupées qui nous empêchent de voler, voler au sens métaphorique aussi bien qu’au sens littéral du terme.
Être capable d’éprouver cette gratitude malgré ces blessures que nous avons en nous, être capable de sentir cette chaleur, cette tendresse intérieure, dirigée vers personne en particulier et en même temps dirigée vers chacun et vers chaque chose, cela est une chose abstraite et, pourtant, tendue vers les feuilles vertes qui brillent au soleil, vers le ciel bleu intense, vers la fraîcheur de l’air, la clarté du jour, l’arôme et l’humidité montant de la terre après une forte pluie, vers le silence, l’harmonie, la mémoire.
Et puis, de manière inattendue quelqu’un apparaît, quelqu’un avec un visage, un nom et un prénom, mais il n’est pas le seul, il y en a d’autres, ils apparaissent les uns après les autres — hommes et femmes —, chacun d’entre eux méritant ma gratitude pour m’avoir donner le meilleur d’eux- mêmes.
Soudain, je suis emportée par une vague de gratitude. Peu importe ce qu’ils sont, ces individus sont tous également présents, là, juste devant moi. La gratitude fait partie de l’ordre cosmique. Il est possible que rien ne dérange plus l’ordre cosmique que le manque de gratitude. Merci et S’il-te- plaît : ces deux simples mots régleraient-ils l’univers entier ? Quelle signification de tels mots pourrait-elle avoir en regard de l’immensité de l’univers ? Et pourtant, pourquoi lorsqu’ils font défaut tout apparaît-il déformé ? Les personnes qui ne les expriment pas s’affaissent, se détériorent et s’estompent. Ils tombent de précipices en précipices, décrivant une spirale qui les plonge jusqu’au fond de l’abîme, si jamais ils l’atteignent.
Le nagual Carlos Castaneda est entré en relation avec une grande variété de personnes. Certains d’entre eux furent des sommets d’impolitesse dans leurs manières d’être. « Eh, qu’importent les manières. Est-ce que les manières ne sont pas juste une autre expression de l’ordre social ? » Oui et non, comme tout. Certaines de ces personnes qui approchèrent le nagual Carlos Castaneda furent réellement grossières. Ils pouvaient éventuellement être raffinés à plusieurs égards, voire élégants, mai s’ils criaient pour être servis et pour ordonner, ignorant totalement les mots S’il-vous- plaît et Merci. Si l’on venait à rencontrer une de ces personnes qui étaient entrées en contact avec le nagual — même peu de temps après — on ne la reconnaissait pas.
Elle avait une allure semblable, mais il fallait la regarder à deux fois avant de l’appeler par son nom. Ses manières avaient changées de telle sorte qu’elle avait les mots Merci et S’il vous plaît constamment à la bouche : elle s’était rendu compte qu’il y a toujours une chose pour laquelle on peut se sentir reconnaissant, comme chacune des petites ou des grandes faveurs, ou les nombreux services que l’on nous rend durant la journée, que nous ayons payé pour cela, et plus encore si nous n’avons pas payé.
Cela représente un paradoxe intéressant, compte tenu du fait que les sorciers nous enseignent en même temps de ne pas dire Pardon sans cesse. Pardon semble rait également faire partie de ces mots en relation directe avec le genre d’ordre cosmique dont nous avons parlé précédemment. Beaucoup d’entre nous — particulièrement si nous sommes des femmes — ont été élevés selon un modèle de soumission, qui a fait de nous des personnes enclines à dire Pardon, même si l’on nous marche sur les pieds. Florinda disait : « ¡Pendeja ! Excuse-toi lorsqu’il y a vraiment quelque chose pour laquelle tu dois t’excuser, mais ne soit pas un Babosa. » C’est ainsi que les personnes qui purent approcher la sphère des sorciers furent façonnées, voire ciselées. Aussi insignifiant que cela puisse paraître, le mot Merci régit tout.
La modestie pénètre ceux qui l’expriment, accueillant avec gratitude ce qu’ils reçoivent, des choses sur lesquelles nous n’avons aucun « droit » intrinsèque, puisque rien ne nous est dû. Le contraire est plus souvent vrai : nous croyons que tout nous est dû. Cela s’impose si naturellement que nous ne le réalisons même pas. Ceci appartient à l’état d’esprit du « créancier », auquel nous sommes tellement habitués. Nous recevons et recevons encore sans prendre conscience du fait que nous recevons, ou de ce que nous recevons.
Le flux est néanmoins constant : des senteurs de la terre à l’aube au pépiement des oiseaux au moment du coucher du soleil, en passant par le délicieux déjeuner que nous avons dégusté en excellente compagnie, aussi bien que les querelles, les maux de tête et la colère. Ils représentent tous la vie et la vie est la grâce initiale, la condition naturelle à tous les autres présents. Être capable de remercier est une forme de pouvoir, ne pas être capable de remercier est un manque de pouvoir. Ce manque de pouvoir nous entraîne en spirale vers la ruine.
C’est la « chute » à laquelle les philosophies et les religions font référence, la fameuse chute de la Chrétienté. La chute dont parle Heidegger, appartiendrait-elle au monde dans lequel la gratitude fait défaut ? La Bible fait référence à la fierté et à la vanité qui emplirent le coeur de l’homme lorsqu’il découvrit que des briques pouvaient être fabriquées en faisant cuire de l’argile, et qu’avec ces briques, il était en mesure de construire tout ce qu’il désirait . Il en vint à construire une tour si haute qu’elle pouvait « toucher les cieux ». Don Juan expliqua à Carlos Castaneda que les grandes cathédrales occidentales n’étaient rien d’autre que la preuve de l’égocentrisme de l’espèce humaine.
Nous pouvons nous demander ce qu’il faut en conclure quant aux gratte-ciels. L’ancien testament complète cette narration en décrivant la manière dont Jéhovah —Di eu— fut irrité par l’attitude de l’homme, si bien que lorsque la tour atteignit une certaine hauteur, Dieu créa la confusion parmi les « langues » des hommes — leurs langages — de telle manière qu’ils devinrent incapables de communiquer entre eux, ce qui empêcha toute progression dans la construction de l’édifice.
La fierté de l’homme avait grandi aussi haut que la tour qu’il avait édifiée: l’homme avait cru qu’il avait été celui qui avait construit cela, qu’il en avait été l’unique auteur. Je sais que cela peut sembler une idée assez bizarre, mais la puissance des Etats- Unis ne serait-elle pas sans relation avec l’institutionnalisation de l’acte de remercier qui existe sous la forme du jour de célébration du Thanksgiving ? Y a-t-il d’autres pays dans le monde qui célèbre l’acte de remercier ? Même si aujourd’hui, la célébration du Thanksgiving n’est devenue qu’un simple événement où l’on ne fait presque rien de plus que de se rassembler en famille pour déguster une pintade. On nous apprend qu’avec la répétition, toute l’authenticité originelle se transforme en coquille vide : la répétition appauvrie la signification.
Si nous pouvions seulement retrouver cet élan originel : la chaleur, la tendresse, la joie et la gratitude qui avait dû emplir le coeur de ces premiers colons qui s’installèrent sur ces terres d’Amérique du Nord. La sorcellerie montre le lien essentiel qui existe entre la gratitude — plus précisément entre le manque de gratitude, et la chute. Nous trébuchons, puis nous tombons, et nous tombons sans fin.
Le nagual Carlos Castaneda disait régulièrement à propos des gens autour de lui : « Ils ont chuté. Untel et untel ont chuté. Machin-truc a chuté. » Des chutes abyssales se sont produites par manque de gratitude. Tomber c’est perdre du pouvoir. Quiconque est au sol ne peut pas faire grande chose, jusqu’à ce qu’il s’efforce de se remettre sur pied, par lui-même ou grâce à une assistance extérieure. La chute de l’homme à laquelle il est fait référence dans toutes les religions et les philosophies constitue le moment où l’homme perd son pouvoir. Le manque de gratitude ne provoque pas seulement la perte du pouvoir, mais est intrinsèquement un manque de pouvoir. Remercier exprime le pouvoir de ressentir de la gratitude.
Rosa Coll est écrivain et philosophe. Ses ouvrages traitent principalement des rapprochements entre les courants philosophiques et la pensée des chamans de l’ancien Mexique. Elle a également donné des conférences durant des séminaires de Tenségrité